Le réfectoire

Il ne devait pas être loin de treize heures, ce mercredi là, quand Olivier poussa la porte du réfectoire, vêtu comme souvent d’un pantalon de cuir noir dont l’étroitesse accentuait sa minceur et d’une chemise de soie blanche, plus ample.
Il mangeait chaque jour à l’Académy … De toute façon, où irait-il, ailleurs qu’ici ? Chez lui ? non … Ca ne lui plaisait pas de rester de ce petit appartement à l’air délabré. Il s’y sentait trop seul. Enfin, question solitude ça revenait au même, malgré une très légère différence …
Olivier passa donc au self, et comme à son habitude, ne prit qu'un dessert. Il avait la fâcheuse habitude de manger entre les repas, ce qui lui enlevait tout appétit aux heures prévues si bien que chaque jour, il se contentait d’une pâtisserie.

Son repas choisi, il s’installa tranquillement à une table. Seul, comme souvent … Un bouquin dans une main, sa petite cuillère dans l’autre, il semblait ailleurs. Loin, très loin de Pioneer … Ses lunettes fines trônant sur le bout de son nez droit, il aurait pu y avoir une prise d’otage à l’Académy qu’il n’en aurait même pas pris conscience … Il était si absorbé par son livre, que sa petite cuillère pleine de crème anglaise se renversa sur sa cuisse à mi-chemin entre son plateau et sa bouche …

A la même heure, sortant du cours de psychologie, Jan arrivait dans le réfectoire avec la délicieuse envie de viande. Peu importait la viande, mais il fallait de la viande. Il entra donc à la suite du jeune homme. L'étudiant le regarda d'un air étrange, il était plutôt mignon, mais jeune tout de même. Après tout il tenterait sa chance un jour ou l'autre... si ce n'est maintenant. Il s'approcha du self à son tour et prit un plateau plutôt bien garni. Ce plat dénottait sa fringale incroyable. Un verre d'eau, un thé chaud, et il s'approcha d'une table quand il revit le jeune garçon. Une soudaine envie le poussa à se poser à ses côtés. Il posa le plateau sur la table, tira la chaise en arrière et se laissa tomber dessus molement puis posa son pied, démuni de sa sandale à présent, sur la table, provocant une faible secousse, secousse qui projeta un peu d'eau sur le bouquin d'Oliver.

Suite à cela il se posta normalement, bien droit et attacha en vitesse ses cheveux, pour, ensuite, baisser doucement le livre et s'excuser. Le buste penché, Jan donnait à Olivier une belle vue de son torse, entre sa chemise froissée, beige et déboutonnée.

"excuse-moi!"

Puis d'un geste étrangement amical il lui tendit une main très affectueuse et chaleureuse. Un délicieux sourir prit place sur son visage en découvrant celui du jeune homme, doux et craquant qu'il s'en mordit discrétement la lèvre inférieure.

Oliver avait ouvert de grands yeux lorsqu'il avait sentit son précieux bouquin se tremper, après qu'un pied ait atterrit sur la table ... Il resta surpris l'espace d'un moment, jusqu'à ce que la main du responsable de tout ce grabuge se tende amicalement vers lui.
D'un geste fébrile, il ébouriffa ses cheveux cendrés et glissa sa main dans celle de Jan, la serrant timidement. Puis soudain, ses joues s'empouprèrent ... Il s'empressa de prendre sur son plateau une serviette de papier pour essuyer son pantalon, dégouliant de crème ...
Il releva ses prunelles d'acier vers celles de l'inconnu, avant de s'y plonger presque inconsciemment. Il resta muet encore quelques secondes, et finit par lâcher un petit sourire. Redressant ses lunettes sur son nez, il ouvrit la bouche pour parler.

" 'Pas Grave ... ^_^"

La voix d'Oliver était presque conparable à la voix encore douce d'un jeune adolescent. Ou bien la voix grave d'une jeune femme ... C'était une voix très basse en tout cas, presque un murmure tout juste audible pour la personne à qui il était destiné.
Il rangea alors son bouquin enveloppé de papier dans son sac beige puis reporta toute son attention sur l'étudiant. Il l'avait déjà vu, dans les couloirs ... Mais il ne le connaissait en rien. Il avait l'air d'être un type plutôt sympa ...

A son tour, il sembla plongé au travers du mur d'acier qui occupait ses prunelles. Jan esquissa un fin sourir avant de lâcher la main du jeune homme. Cette voix l'émerveillait. Il était jeune cela se voyait, mais c'était la première fis qu'il le remarquait et il semblait faire preuve a la fois d'une certaine maturité et d'une gaminerie pas croyable.

"Bien...Je m'appel Jan..."

Il quitta son regard un instant et se mit à manger son plat d'un air doucereux.

"Ca ne te dérange pas que je mange avec toi?"

Les émotions et les pensées se bousculaient dans sa tête. Après le professeur de psychologie, voilà qu'il avait droit à ce petit minet. Il but une gorgée d'eau et brassa son thé.

"Dis moi, quelles études suis-tu ici bas?"

En effet pour lui l'académy n'était pas de tout repos. Entre ces examens de dernière année pour passer sa license et ses affreux camarades de classe, ce lieu était pour lui plus l'enfer que le paradis, mais il s'y sentait tout de même bien. Qui sait ce qu'il adviendrait de lui si la direction apprenait ce qu'il se passait dans le secret avec quelques uns de ses confrères...

L'adolescent n'avait finalement pas encore touché à son brownie. Il observait, rêveur comme souvent, son interlocuteur commencer son repas. Son léger sourire toujours présent sur son visage androgyne, il croisa ses mains arachnéennes sous son menton.

"Non tu peux rester ... Et euhh, moi c'est ... Oliver ^__^ Et je suis en terminale ..."

A observer le jeune homme, il se doutait bien qu'il était plus âgé. Il finissait sans doute ses études, alors que lui même ne faisait à peine que les commencer.
Nerveusement, il croisa ses jambes sous la petite table, faisant involontairement crisser le cuir de son pantalon avant que ses joues ne s'empourprent de nouveau.

"Humm ... Et toi ?"

En terminale? Un jeune comme le préconisait son interlocuteur. A présent Jan s'était lancé, sans trop le vouloir, dans l'analyse physique d'Oliver tout en faisant tourner sa petite cuillère dans la tasse, provocant ainsi un bruit incessant causé par le choc entre la porcelaine et le métal.
Un fin sourir illuminait son visage d'ange et il essayait par dessus tout de faire en sorte que le jeune homme plonge à nouveau son regard dans le sien pour s'y perdre.
Pourquoi donc une telle attitude alors qu'il venait de quitter son amant de toujours? En effet après le cours de psycho il était resté en salle pour passer un moment seul avec son professeur... Mais soudainement quelque chose illumina son regard imperturbable. Une idée apparut d'un coup. Le garçon assit en face de lui était la nouvelle proie à ses envies, il le lui fallait malgré Iron!

Les paroles semblaient sortir de sa bouche comme un simple bruit de fond, comme les réponses que fournissait alors Jan. Oliver fut à peu près tout ce qu'il retint réellement.

"Je suis en dernière de psychologie..."

On aurait pu croire qu'il était fatigué vu le ton endormi qu'il employait, et sans s'en rendre vraiment compte il ajouta:

"Je te conseil ces études, le prof de psycho est super beau..."

Voilà qu'il l'informait déja sur sa sexualité... A se demander ce qui arrivait au pauvre Jan, quoique... toute sa classe le savait pertinemment. Mais ce qu'il ajouta était encore plus perturbant, toujours autant subjugué par le regard du jeune homme.

"En plus c'est un super coup je te dis pas..."

C'est là qu'il sembla se prendre une claque et qu'il secoua la tête de droite à gauche très rapidement, faisant voltiger sa queue de cheval.

"Mais qu'est-ce que je raconte?! Excuse moi je divague..."

sa voix était déja plus posé et plus ferme... Il reboutonna immédiatement sa chemise et se mit à manger son plat plus rapidement, comme emporté soudainement par une certaine folie. La bouche à moitié pleine il articula comme il pouvait:

"Bon je crois que je vais te laisser j'ai cours dans 45 minutes..."

Comme si en 45 minutes il n'avait pas le temps de manger et de rester avec Oliver... C'est juste que là soudainement, il se sentait coupable de tromper, rien que par la vue de ce pantalon moulant en cuir, son Iron chéri...

Oliver, malgré sa timidité prononcée, n'avait pu s'empêcher de sourire aux premières phrases de l'étudiant. C'était plutôt intéressant, pour lui, de savoir ça ... Mais contrairement à Jan, personne ne savait rien sur les préférences d'Oliver. garçon solitaire et réservé, il avait toujours gardé tous ses sentiments pour lui.
De nouveau, son regard rêveur se planta dans celui de Jan, si sombre, si intriguant, ce qui n'avait pour effet que de faire travailler l'imagination de l'adolescent. Jan ferait un bon modèle ... Très bon même ...
Mais à peine envisageait-il de lui parler de nouveau qu'il se mit à manger plus vite, pour enfin dire qu'il ne lui restait que quarante-cinq minutes ...
Les sourcils levés dans une expression de légère tristesse, Oliver observa plus intensément son interlocuteur.

"Mais ... T'as encore le temps ..."

Le regard humide, perdu dans les ténèbres qu'étaient les prunelles de Jan, il se mordit presque involontairement l'intérieur des joues. Il ne voulait pas qu'il le laisse si tôt, pour une fois qu'il pouvait manger avec quelqu'un ...

"oui" avait-il répondu songeur...

Son air absent avait pris une nouvelle fois place. La tête tournée vers les fenêtres, son regard semblait vide et infini. Il tourna alors soudainement la tête. Une idée venait d'illuminer le néant de son regard. Un fin sourir avait pris place sur sa mine songeur. Dans sa tête les événements se bousculaient.
Il voulait passer un moment seul avec le petit. Le refectoire était vide, mais n'allait pas tarder à se remplir, il fallait donc trouver quelque chose. Et, conaissant son horaire, Jan irait dans la salle qu'occupait le professeur de psychologie. Si elle était fermée à clé ce n'était pas un problème. Dans sa tête déja le chant de la victoire était jouée. Malheureusement Jan ne savait pas ce qu'il s'y tramait en ce moment. Mais après tout... il l'aurait su un jour ou l'autre et s'il emmenait Oliver s'était également pour tromper son amour.

Il se leva brusquement en lançant d'une voix ferme avec un sourir malicieux.

"J'ai une idée, viens!"

Son regard se plongea quelques instants dans celui de son interlocuteur. Il le détourna rapidement et attrapa la main du jeune homme pour le tirer hors du reféctoire.

Le bruit de la course résonnait sur le carrelage, laissant la cuillère de son thé tourner dans la tasse à présent vide.
Un long silence s'était installé avant son idée, un silence pesant qui l'avait forcé à trouver une idée. Jan était content et courait comme un gamin qui découvrait un nouveau jeu. Il détacha prestement ses cheveux et les laissa flotter derrière lui comme il l'aimait.

Le petit repas d'Oliver restait lui aussi seul sur la table.

Arrivé dans les couloirs Jan lança doucement à Oliver avant de ralentir la cadence:

"on y est presque... Salle de psychologie..."

[Suite dans le topic "tricherie"]